La prison est "une anomalie, un cancer diffusant ses métastases dans l’organisme sociétal"

Sur son blog de salubrité publique, le taulard Laurent Jacqua publie un texte d'une force impressionnante à la suite des meurtres et suicides qui fleurissent dans les camps de concentration de la République (il rédige ses billets dans sa cellule et c'est son épouse Leïla qui les met en ligne).

Petit rappel : dans le même temps, la "remarquable" et intelligente Rachida Dati veut abaisser la majorité pénale à 12 ans (y a-t-il une réponse plus pertinente aux suicides des 16-17 ans à Metz ou à Strasbourg ?).

"La prison, de par sa nature profondément criminogène, est nuisible et dangereuse pour la société toute entière car elle engendre et relâche des hommes et femmes dont le traumatisme est si grand que leur métamorphose empêche tout retour à la vie sociale dite « normale ». Violences, récidives, dépressions, suicides, toxicomanies, alcoolismes, inadaptations, dangerosités, troubles psychiatriques etc.… voilà le véritable bagage que tout condamné emporte avec lui à la fin d’une peine. Et on imagine, avec tous ces ingrédients, les conséquences désastreuses et les dégâts que cela peut avoir sur le monde extérieur. [...]

La véritable dangerosité ne provient donc pas des détenus mais de la prison elle-même ! En réalité c’est elle qu’il faudrait réinsérer, car elle est une anomalie, un cancer diffusant ses métastases dans l’organisme sociétal !

La prison, telle qu’elle est conçue aujourd’hui, n’est pas là pour réadapter ou réparer mais pour punir et détruire le prisonnier ! Et si ça on ne l’a pas compris, ce n’est pas la peine de chercher un antidote au problème. Il faut réformer totalement le monde carcéral de fond en comble et pour cela il faudrait des moyens colossaux que nous n’avons pas.

La seule solution sécuritaire, même si elle est la plus facile à mettre en place, est une erreur monumentale, car plus la sécurité sera augmentée au sein des détentions, plus la violence y sera à l’étroit et plus elle y sera explosive et barbare. C’est une équation implacable que l’on a d’ailleurs pu constater dans l’exemple criant des prisons américaines type « super max » (de haute sécurité). Dans ces établissements, où souvent aucun espoir de sortie n’est permis, les meurtres entre gangs, entre détenus sont d’une sauvagerie impitoyable, ce qui prouve bien l’inefficacité d’un système sécuritaire pour endiguer la violence carcérale, au contraire cela ne fait que l’exacerber. (Voir à ce sujet la très instructive série documentaire de National Géographique sur les prisons US).

Si l’on voulait transformer les hommes en animaux prédateurs et les prisons en usines à récidivistes, on ne s’y prendrait pas autrement.

Mais alors qu’elle est la solution ?

Hé bien sachez qu’il n’y en a pas ! Car, nous le savons, tout le monde se fout éperdument de ce qui peut bien se passer dans les prisons et puis avec quel gouvernement, quel argent va-t-on se décider une bonne fois pour toute à prendre le taureau par les cornes ?


Oui je suis très pessimiste et je pense que l’orientation se fera sur le modèle américain : constructions de nouveaux établissements haute sécurité, allongement des peines, perpétuités réelles, rétentions de sûreté, et tout un arsenal juridique toujours plus absurde, toujours plus répressif. Le carcéral finira, comme tout le reste, par devenir un bisness, et on y gérera la violence comme on gère une société qui gronde, cela avec toujours plus de flics, toujours plus de rétorsions, toujours plus de lois, toujours plus de règles, toujours plus de répression…de toute façon à cause de la crise mondiale, les sociétés, à moins d’une révolution soudaine qui nous sauverait peut-être, sont en passe de devenir des prisons à ciel ouvert, mais vous ne le savez pas encore. Le jour où vous vous en rendrez compte, bien installé au fond de votre canapé, vous saurez ce que veulent dire les mots « arbitraire », « abolition des droits », « privation de liberté » « surveillance » « fichage » « contrôle » car on y viendra tout doucement jusqu'à ce qu’un jour, vous fassiez vous aussi partie « d’une espèce à part »…


Vous devriez tous, dés maintenant, vous sentir concernés et vous inquiéter des problèmes liés au monde carcéral, car, sachez-le, celui qui s’est fait égorger et qui s’est retrouvé seul face à un tueur psychopathe n’était incarcéré que pour un petit délit routier...

Demain, qui sait, en prenant le volant de votre véhicule, vous pouvez causer un grave accident et vous retrouver illico en prison, cette fosse à purin qui vous dégoûte tant aujourd’hui, et à ce moment là qui vous protégera au fond de votre cellule face à ceux que vous avez si bien ignoré ?...
De nos jours plus personne n’est à l’abri, cela mérite réflexion, non ?..."

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2 commentaires:

Anonyme a dit…

Ca me fait penser à une publicité actuelle : "Quelle société peut se passer de ce métier ?"

Le métier dont on parle c'est ... gardien de prison.

A cette lecture on devient immédiatement anarchiste.

Anonyme a dit…

2ième commentaires : dans une vie précédente j'ai retenue cette définition de la prison : une machine à veillir. Son but est de provoquer un veillissement anticipé des individus afin de les empêcher de "nuire" à nouveau.